Accéder au contenu principal

L'école Sainte Marie et la carrière de soeur Marthe du Sauveur

L’école Sainte-Marie et la carrière de sœur Marthe du Sauveur

L’école Sainte-Marie de Saint-Jean-de-Boiseau a connu une importante reconversion. Ce lieu d’enseignement privé de plusieurs générations de jeunes filles est devenu une très belle médiathèque et un lieu culturel pour plusieurs associations communales. Mariette Thomazeau nous révèle à travers son article l’histoire de cette école qu’elle a bien connue dans son enfance. La chance et la persévérance lui ont permis de retrouver l’une de ses maîtresses, sœur Marthe. L’émotion était au rendez-vous après toutes ces années écoulées.
La création
Depuis longtemps M. Nouël curé de Saint-Jean-de-Boiseau fait des démarches afin d'obtenir des sœurs pour sa paroisse, mais jusque-là il n'a pu réussir car les obstacles financiers sont énormes. L’école est finalement fondée le 13 octobre 1872. Pour réaliser son projet, il donne sa maison et 1150 francs, la fabrique apporte 400 francs et le marquis de Tainguy, propriétaire du château du Pé 350 francs.
La maison ainsi que tout le mobilier appartiennent ensuite à la congrégation des sœurs de Saint-Gildas-des-Bois.
Les sœurs enseignantes n’auront d’autres ressources que les rétributions scolaires et à partir de 1874, le produit de la location des bancs qui ont été mis dans l’église et qui sont loués à l’année pour la somme de 2 francs aux filles de plus de 10 ans, des deux écoles, publique et privée. (Somme perçue par la fabrique).
Pour son ouverture l’école reçoit une soixantaine d’élèves.
Les Sœurs Marie Clémentine et Sainte Porphyre sont les premières enseignantes. Habituellement, la sœur supérieure fait la 1ère classe, une adjointe fait la 2ème, aidée d'une autre sœur. Cette autre sœur est là pour s'initier à la fonction d'enseignante, ce qui explique le changement tous les ans ou presque de certaines sœurs.
En 1889 l’école comporte trois classes et la mère supérieure est sœur Félix. Elle a deux adjointes : sœur Marie de la Lance et sœur Saint Bélier. Il y a aussi une cantine dont la cuisinière est sœur Stéphanie qui fait aussi le jardin. Vous trouverez en annexe toutes les enseignantes de cette école jusqu’à sa fermeture. L’une des classes est une classe enfantine pour les moins de 6 ans. En 1895, l’effectif est de 85 filles et enfants de moins de 6 ans.
1902, afin de pouvoir prendre les enfants à l’âge de 4 ans, la deuxième classe est transformée en classe enfantine et l’ouverture d’une nouvelle classe est envisagée.
Les lois Combes
En 1902 la lutte entre l’école publique et l’école privée entame une polémique qui va durer plusieurs années. A Saint-Jean, plus particulièrement, l’effectif des élèves dans le privé est bien supérieur à celui de l’école publique. Cette situation avec le nouveau gouvernement et son président du conseil Emile Combes ainsi que le ministre de l’Éducation Aristide Briand, va être soumise à rude épreuve. S’appuyant sur la loi de 1901 sur les associations, ils vont tenter de supprimer les écoles congréganistes. En effet le texte de loi, toujours en vigueur, prévoit que l’école doit être gratuite et à but non lucratif, ce qui n’est pas le cas des écoles privées où une participation financière est exigée des parents. S’appuyant sur le texte du gouvernement, l’ouverture d’une quatrième classe pour l’école Sainte-Marie est refusée par la municipalité.
Courrier à la mère supérieure du 23 février 1902
Le conseil vu la demande d’autorisation formulée par les sœurs de Saint-Gildas-des- Bois établies à Saint-Jean-de-Boiseau, considérant que l’école des sœurs de Saint- Gildas-des-Bois établie dans la commune a pour but de donner un enseignement absolument confessionnel et hostile aux principes républicains, que cette «école est soutenue par le clergé et ses diverses sociétés religieuses. Qu’elle empêche par tous les moyens le recrutement des écoles publiques, que les pères de famille dont les enfants fréquentent l’école Laïque sont en butte à toutes sortes de vexations de la part du clergé, que cette école n’a pas été créée dans un but charitable mais très rémunérateur au contraire puisqu’elle a des élèves payantes, des études et un pensionnat, que l’école des sœurs de Saint-Gildas-des-Bois comme celle des frères de Ploërmel est une cause de discorde dans la commune et même au sein des familles, qu’elle prépare et plus que jamais pour l’avenir une jeunesse élevée dans les principes fanatiques et des idées d’intolérance religieuse et que sa suppression s’impose, délibère :
Le conseil municipal refuse avec la plus grande énergie la demande d’autorisation formulée par les sœurs de Saint-Gildas-des-Bois, y donne un avis défavorable comme celui des frères de Ploërmel et demande la suppression des deux écoles congréganistes.

Plus grave, l’école est menacée de fermeture. Pour contourner la loi, l’Eglise va procéder à des modifications d’organisation au sein des écoles privées. Ainsi, le clergé va créer des ordres séculiers, « les déshabillés », pour permettre aux sœurs d’enseigner. Mais le gouvernement n’est pas dupe du procédé et adresse le courrier suivant à la mère supérieure de la congrégation :
Document du ministère de l'intérieur et des cultes. Paris le 19 mai 1902.
Madame.
A la date du 10 janvier 1902 vous m'avez adressé une demande rendant à obtenir l'autorisation prévue par l'article 13 & 2 de la loi du 1er juillet 1901, notamment en faveur de 50 établissements de votre congrégation situés dans le département de Loire-Inférieure dont Saint-Jean-de-Boiseau.
Après examen des pièces produites à l'appui de cette demande et des résultats de l'instruction à laquelle il a été procédé, j'ai décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre les dossiers en conseil d'état en vue des autorisations sollicitées.
En conséquence, j'ai l'honneur de vous notifier que votre demande est rejetée en ce qui concerne les établissements de votre congrégation ci-dessus désignés.
Je vous rappelle qu'aux termes de la loi du 4 octobre 1902 sont passibles des peines portées à l'article 8 & 2 de la loi (amende de 16 à 5000 f et emprisonnement de 6 jours à 1 an) tous individus qui sans être munis de l'autorisation exigée par l'art 13 & 2, auront ouvert ou dirigé un établissement congréganiste de quelque nature qu'il soit, que cet établissement appartienne à la congrégation ou à des tiers ; qu'il comprenne un ou plusieurs congréganistes."
Le président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes.
E. Combes

Le courrier est suivi d’un ordre d’exécution adressé au préfet :
Nantes le 12 juillet 1902
Le commandant de la gendarmerie de Loire Inférieure au chef de brigade de Saint-Gildas-des-Bois
De la part de M. Le Préfet de la L.I. notifiez immédiatement aux directeurs ou supérieurs des établissements scolaires congréganistes privés qui n'ont pas fourni les justifications demandées par lettre du 11 courant qu'un délai de 8 jours leur est imparti pour se retirer au siège de leur congrégation et fermer l'établissement qu'ils tiennent indument, sous peine d'y être contraints par les voies légales.
La présente mise en demeure concerne seulement les établissements d'enseignement privés.
Procès-verbal sera adressé de cette notification.
Ajouter à la liste d'hier l'école des filles de Saint-Gildas
Signé Cacheux
Devant cette menace la congrégation fait de la résistance et le ministre adresse une nouvelle missive qui est sans équivoque.
Paris le 16 juillet 1902
Madame
Vous m'avez adressé le 5 juillet une demande en vue d'obtenir l'autorisation de nombreux établissements de votre congrégation ouverts avant la promulgation de la loi sur le contrat d'association dans les départements de la Loire Inférieure, du Maine et Loire et d'Ille-et-Vilaine, du Morbihan et de la Vendée. J'ai le regret de vous informer qu'il ne m'est pas possible d'accueillir cette demande, formée après l'expiration du délai de 3 mois fixé par la loi du 1 juillet 1901 et même du délai supplémentaire que le gouvernement avait consenti à accorder aux Congrégations à la date du 5 décembre dernier.
Comme conséquence de cette situation, je crois devoir vous donner le conseil de rappeler dans le plus bref délai, à votre maison-mère, les sœurs de ces établissements qui ne sont couverts par aucun récépissé.
Recevez Madame…..
Le président du conseil ministre de l’Intérieur et des cultes
E. Combes

Cependant le gouvernement n’a pas les moyens financiers d’assurer dignement l’éducation de tous les enfants sans l’aide du privé et accepte que des séculiers assurent l’enseignement. Pour l’école Sainte-Marie, Sœur Saint-Jean de la passion qui a succédé à sœur Félix, reprend son nom civil de Jeanne Marie Audouin, appelée souvent par ses élèves Mlle Jeanne ou Mlle Audouin. L’école ne sera fermée que de juillet à fin septembre.
Après 1906, les sœurs reprendront l’habit religieux et cohabiteront avec des enseignantes sécularisées. Ces dernières étaient coupées de la congrégation. Elles enseigneront jusqu’en 1973.
De 1903 à 1940 il y eu deux sœurs supérieures.
En 1923-1924, une nouvelle classe enfantine pour garçons et filles est construite et fonctionne dès 1925. On ajoute aussi un préau et on refait la buanderie
1928-1929 Forage d’un puits.
1931 Une sœur infirmière arrive à Saint-Jean.
Les séances récréatives permettent de financer les travaux de réparation.
En 1935 l’effectif est de 84 élèves : 25 et 26 dans les deux classes et 43 dans la classe enfantine.
1966 L’école comporte la 1ère classe tenue par Sœur Joseph de la Nativité, la 2ème est tenue par une demoiselle, la classe des petits par sœur Marie-de-Massabielle, et un dispensaire de deux pièces est géré par l’infirmière sœur Félix.
En 1965, l’école est vétuste et trop petite, aussi le curé Rucher décide-t-il d’entreprendre d’importants travaux.
Pendant le chantier, le château du Pé héberge la classe de 1ère et le patronage les deux autres.
La cantine et son matériel sont transférés dans une grange où mangent les garçons. Les filles prennent leur repas dans une petite salle basse et humide. Pour 100 convives, la cuisinière dispose d’un petit fourneau et de 2 ou 3 trépieds posés sur des pierres.
La cuisinière est hébergée chez Mme Ducoin, une femme atteinte de polio qui vit près de la cure, alors que les autres sœurs couchent au dispensaire sur des lits pliants. Les demoiselles demeurent chez l’habitant.
L’agrandissement de l’école permet de réaliser un escalier extérieur pour deux classes aménagées à l’étage (à l’emplacement des chambres et du grenier) et de refaire la cuisine. Le local de la cantine est construit un peu à l’écart, dans la cour, et communique avec la cuisine. A cette époque la cantine est gérée par M. Blandin. C’est lui qui établit les menus, fait les achats et paie les deux personnes employées : une sœur et une civile.
Les travaux seront rondement menés et les élèves regagneront leur belle école en avril 1966 après les vacances de Pâques.
Souvenirs de Sœur Bernadette
A partir de la rentrée 1973-1974 des enseignantes laïques prendront la relève jusqu’à la fermeture de l’école en 2000. Depuis deux ans elle n’était plus utilisée que pour la périscolaire avec 41 élèves. C’est Carole…. qui en fut la dernière enseignante. Achetée par la municipalité, l’argent a permis la modernisation de l’école Saint-Marc qui dès lors deviendra mixe.
Sœur Marthe
En faisant des recherches sur les sœurs de Saint-Gildas-des- Bois, j’ai constaté que les religieuses ont enseigné à l’école Sainte-Marie de Saint-Jean de Boiseau, de 1875 à 1973.
Parmi toutes celles qui ont exercées, trois sont encore dans leur résidence de retraite :
Sœur Jean Renée qui exerça de : 1946 à 1948
Sœur Marthe du Sauveur de : 1953 à 1959
Sœur Louis de la Miséricorde de : 1960 à 1966

Sœur Marthe, de son nom de jeune fille Jeanne Lecuyer est la religieuse dont je fus l’élève. Je lui rends visite régulièrement à la maison des sœurs « Les Naudières » à Rezé.
classe de soeur Marthe en 1957

A ma première visite, ma surprise et ma joie ont été grandes de la trouver en bonne santé malgré ses 93 ans. Elle a pu évoquer avec moi, les souvenirs de sa vie, qu’elle souhaite nous transmettre.
Je suis née le 15 février 1918 à Frossay, 10eme enfant de la famille, papa parti à la foire d’Arthon acheter des bœufs trouva dans le berceau, à son retour, une fille, lui qui voulait un garçon ! Quelle déception !
Je suis allée en primaire à Frossay puis à Toutes Aides, en pension.
J’ai travaillé dur pour devenir maîtresse d’école, je m’étais promis d’être bonne avec mes élèves, ça c’est sûr, Sœur Saint Raymond était trop sévère.
Je me souviens d’une anecdote :
Il m’arrivait souvent de ne pas barrer les T et d’oublier les accents. Toutes les copies avaient été corrigées sauf deux, dont la mienne, Sœur Raymond m’a fait venir à son bureau et m’a dit « Tu le fais exprès », d’abord, j’ai dit « Non, ma sœur » mais elle m’a traité de menteuse.
Dans ma tête d’enfant, je me suis dit, si je redis non, elle va à nouveau me traiter de menteuse, alors j’ai dit « Oui, je l’ai fait exprès ».
Oh ! Là là ! Toute la classe a été punie à genoux, a dû dire un acte de contrition et les élèves ont dû prier pour ma conversion !
La sœur avait tout compté comme fautes, j’en avais 52 (accents et T non barrés). J’étais souvent punie.
A 13 ans, j’ai eu la typhoïde, j’ai été si mal que j’ai reçu les derniers sacrements, mais je m’en suis sortie !
Après Toutes Aides, premier poste à Chauvé pendant deux ans.
Je suis rentrée à Saint-Gildas-des-Bois, ma prise d’habits eut lieu en 1941, j’avais 23 ans, j’ai choisi moi-même mon nom de Sœur Marthe du Sauveur.
Mon papa a dit en pleurant « Mon rayon de soleil s’en va »
Mon premier enseignement en tant que sœur fut à Grand-Champ-des-Fontaines jusqu’en 1942, puis aux Moutiers-en-Retz de 1945 à 1953.
Je suis arrivée à Saint-Jean-de-Boiseau en 1953 où je suis restée jusqu’en 1959.
Lors de cette période, je me souviens que les jeunes filles qui aidaient les sœurs recevaient du courrier. Celui-ci était ouvert par les sœurs qui le lisaient avant de le remettre aux jeunes filles, par crainte qu’elles ne reçoivent des courriers galants !
Quelle ne fut pas la surprise de l’une d’elles, heureuse de recevoir une lettre de sa maman non ouverte.
1959, année de mon départ de Saint-Jean-de-Boiseau :
J’avais dérogé au règlement de la Congrégation de Saint-Gildas qui interdisait aux religieuses de parler seule à seul à un homme ; or, pendant les fêtes du Pé, j’avais parlé à Gaby Gadois, qui était enseignant à l’école Saint-Marc, et ma supérieure, venue voir où en étaient les préparatifs de la fête du Pé, nous avait vu parler ensemble.
Puis une autre fois, je suis allée à Frossay voir mon père très malade, sans autorisation de ma supérieure, mais j’avais reçu l’autorisation exceptionnelle de l’abbé Rucher.
A la suite de ces deux manquements à l’ordre, j’ai dû quitter Saint-Jean-de-Boiseau pour montrer mon respect à l’ordre de la Congrégation.
J’ai eu beaucoup de chagrin de quitter Saint-Jean-de-Boiseau.
De plus, l’abbé Rucher ainsi que Sœur Saint Félix étaient à Saint-Jean-de-Boiseau en mission en même temps que moi, nous avons partagé de bons moments, d’amitié, de foi, de partage et de compréhensions mutuelles. Je les porte toujours dans mon cœur.
Les fêtes du Pé ont été et sont toujours de bons souvenirs.
De 1959 à 1969, je suis enseignante au Grand Auverné.
De 1969 à 1982, j’enseigne à l’Immaculée de Saint-Nazaire.
De 1982 à 2006, je suis retraitée à Rezé, mais en travaillant bénévolement à la formation de la catéchèse pour les laïcs, qui feront à leur tour le catéchisme pour les enfants, ceci avec frère Loïc Cognier.
A partir de 2006, je suis vraiment en retraite à la maison des sœurs « Les Naudières » à Rezé.
Sœur Marthe, reste un bon souvenir scolaire pour moi nous dit Mariette. Je me souviens…
Avec les beaux jours, nous allions au Château du Pé, un après-midi par semaine, nous emportions des travaux d’aiguilles : canevas, broderie… Lors d’un cours de couture, une élève dut reprendre son travail plusieurs fois, Sœur Marthe la gronda très fort. Après plusieurs essais, l’élève réussit son ouvrage et reçut les compliments de la sœur. Elle fut si contente qu’en rentrant chez elle, elle dit à sa mère : Maman, la sœur m’a grondée très fort parce que j’avais mal travaillé, mais elle m’aime quand même, elle m’a demandé pardon et m’a embrassée.
En fin d’année scolaire, nous faisions un jeu de piste appelé « La main blanche ».
Sœur Marthe, nous conduisait au Pé, une fille de la classe était désignée et devait attraper les autres avec sa main enduite de farine, celles qui étaient touchées restaient avec elle, ainsi de suite…
Toutes les rencontres que je fais avec sœur Marthe, aux Naudières sont importantes et fructueuses pour moi. Je vais la voir avec plaisir et nous continuons de partager nos souvenirs. Je suis contente de l’avoir retrouvée.

Mariette Thomazeau

Souvenirs de Marie Josèphe Truin à l'école Sainte Marie
Marie- Josèphe Truin- Moreau, née en 1914, a commencé sa scolarité en 1919.
Les enfants allaient à l'école à 5 ou 6 ans. Ils entraient à "l'asile", la maternelle. Autrefois les garçons étaient admis dans cette école de filles. A 7 ans ils partaient à l'école Saint-Marc.
On apprenait à lire dès la première année. Les lettres d'abord, les syllabes, puis les mots. En même temps on écrivait les lettres sur un cahier à 2 lignes, au rayon de bois. L'élève avait d'abord utilisé l'ardoise pour bien se familiariser avec l'écriture. On apprenait beaucoup de chants et poésies" par cœur". Les récréations des "petits" n'étaient pas aux mêmes heures que celles des "grands", il n'y avait qu'une cour de récréation.
A 7 ans, les élèves passaient dans la seconde classe, ils savaient presque tous lire et écrire. Au cours de cette seconde année on apprenait les "tables", 1 et 1, 2,2 et 2 :4, on entendait bien au-delà des murs de la classe, les élèves, ensemble, réciter leurs tables. On cultivait beaucoup la mémoire à cette époque.
Il existait au moins 3 divisions dans cette classe. La maîtresse devait les faire travailler ensemble mais avec des cours différents. Les uns copiaient une dictée écrite au tableau, les autres lisaient tout haut pendant que les grands étaient plongés dans un problème d'arithmétique. Quand il le fallait, les grands aidaient les petits qui n'avaient pas compris.
On rentrait en classe à 9h, la récréation était à 10h30, puis à midi. Il n'y avait pas de cantine. Les élèves du bourg retournaient chez eux, les autres mangeaient sous le préau dans leur gamelle. Le repas était très frugal : du pain, du beurre, une sardine écrasée dessus, 2 noix ou une pomme. L'eau du robinet servait à se désaltérer. Lorsqu'il faisait froid, la directrice, mademoiselle Olivaud, ramassait tout ce petit monde dans la grande cuisine de l'école.
A 13h30, les cours reprenaient, une récréation à 15h et à 16h30 les élèves reprenaient, à pied, le chemin de la maison familiale. Deux à trois kilomètres pour certains.
Le jeudi était le jour de congé. Il n'y avait pas autant de vacances qu'aujourd'hui. Il n'y avait que quelques jours à Noël et à Pâques puis les grandes vacances du 14 juillet au 15 septembre.
La classe du certificat d'étude, était la " grande classe" ayant souvent la directrice de l'école comme institutrice. On passait dans cette classe vers 11 ans, suivant les capacités de chacune. Redoubler était chose courante. Il y avait aussi plusieurs divisions dans cette classe. La grande division travaillait les épreuves des examens des années précédentes. Comme dans la 2ème classe, on faisait une dictée tous les jours. Le français, avec la grammaire, et le calcul étaient les matières les plus importantes, mais il fallait aussi apprendre la physique, la géographie, l'histoire de France, les sciences naturelles, le dessin, la poésie et le chant. (Si la maîtresse savait chanter).
Dans chaque classe il y avait l'heure ou la ½ heure de catéchisme 1 ou 2 fois par semaine, avec des devoirs écrits. Tous les jours, dans les grandes classes, (1ère et 2ème), quand l'heure sonnait, la maîtresse tapait sur le bureau et disait » : mettons-nous en la présence de Dieu". Chacune joignait les mains et restait tranquille jusqu'à la prière commencée par la maîtresse : " cœur sacré de Jésus, j'ai confiance en vous". La leçon ou le cours continuaient ensuite.
Pour récompenser les "premières", il y avait une médaille avec un ruban que l'on accrochait sur la blouse d'écolière avec fierté. Les "bons points", petits morceaux de carton de couleur, avec une pensée morale écrite dessus, étaient aussi des récompenses pour : sagesse, service rendu à une élève ou à la maîtresse. Il ne fallait pas les perdre car lorsqu'on en avait un certain nombre, il fallait les rendre à la maîtresse qui en échange nous donnait de tous petits bonbons ronds de plusieurs couleurs.
A 17h, "les grands" restaient à l'étude, sauf en hiver, pour revoir les matières qui n'étaient pas très bien assimilées, comme par exemple : recommencer un problème ou la dictée du matin.
Les élèves rendaient beaucoup de services (à leur portée) à l'école.
A l'automne, les feuilles mortes étaient ramassées pendant les récréations, on les mettait dans le jardin pour les faire brûler. Le ménage des classes était fait par les élèves, sauf à l'asile. L'hiver, il fallait alimenter le poêle central, il marchait au bois, ce qui veut dire : le charger, celles qui rendaient ce service étaient bien placées pour avoir chaud, aussi fallait-il changer d'élèves pour ne pas faire de jalouses. Beaucoup d'élèves avaient des mitaines de laine pour pouvoir écrire, car il ne faisait pas chaud malgré le poêle.
Les punitions existaient : aller sous l'escalier quand on avait bavardé ; copier 10 fois les mots de la dictée qu'on avait mal écrits ; conjuguer les verbes par exemple " je ne bavarde pas en classe" à tous les temps simples ou composés. Ces punitions écrites devaient être rapportées le lendemain matin. On copiait beaucoup, toujours pour la mémoire : les mots, les verbes, les dates de l'histoire, les préfectures, les départements, les cartes de France etc…
L'arithmétique et ses unités de mesures sont compliquées pour les élèves car on parle toujours en journaux, toises, boisseaux etc et on ne comprend pas les unités du système métrique que le maître veut nous apprendre ce qui pose des problèmes.
Jeannette Bertet, épouse Ordrenneau complète les propos de Marie-Josephe Moreau sur la vie à l'école et sur la pose du midi.
"Habitant au Vieux Four je faisais partie de celles et de ceux qui n'avaient pas la possibilité de retourner chez eux pour déjeuner le midi. Les sœurs avaient aménagé près de leur cuisine un réfectoire.
Chaque jour nous étions quelque 8 filles et autant de garçons (assis à des tables séparées) à nous partager le repas préparé par la sœur cuisinière.
Le repas était frugal. Il était composé, en grande partie, à partir des produits des jardins qu'apportaient nos parents. A mon grand désespoir, la soupe aux choux apparaissait souvent au menu des jours d'hiver. A chaque repas, nous avions droit à un peu de vin coupé d'eau.
A chaque repas nous récitions le bénédicité. Ensuite, avant de commencer à nous restaurer, chacun de nous, à tour de rôle, lisait, à haute voix, l'évangile du jour. A chaque fois que venait mon tour, j'appréhendais cette lecture devant les gars qui étaient toujours prêts à se moquer de nous."

Posts les plus consultés de ce blog

Edmond Bertreux

  1 - Origine familiale Les ancêtres d’Edmond Bertreux, sont originaires de Saint Jean de Boiseau du côté paternel et de Bouguenais du côté maternel. Sa mère Marie, née David, est la fille d’un patron pêcheur des bords de Loire vivant quai de la vallée à Bouguenais. Paul David a été immortalisé devant sa maison, dans sa plate, par Pierre Fréor. Bien plus tard, Edmond, son petit fils, devenu peintre immortalisera sur de nombreuses toiles ce paysage bucolique du bas de Bouguenais.    Son grand-père paternel, Jean-Marie, habite le village de Boiseau en face de la place de la République où se trouve l’arbre de la liberté.   Lorsqu'il a fini sa journée de travail à Indret, il effectue des travaux agricoles dans sa vigne pour "mettre un peu de beurre dans les épinards". Son fils Jean, le père d’Edmond Bertreux, est dessinateur industriel aux Chantiers de la Loire à Nantes. Il est par ailleurs peintre amateur et se retrouve régulièrement à Saint-Jean-de-Boiseau pour y ex

Les mattaras : vestiges de l'âge du bronze

  A la place de l'actuel bourg de Saint-Jean, des objets en bronze furent retrouvés en un lieu appelé « le trait de la cour », dans le lotissement actuel des Violettes. C'est dans le courant du mois d'avril 1821 qu'un vigneron du bourg de Saint-Jean-de -Boiseau brisa avec sa houe, en travaillant dans sa vigne un plat de poterie commune recouvert d'une assiette de la même terre contenant huit instruments en bronze et longs de 6 pouces (162 mm). Le vase était encastré dans une cavité de rocher faite avec un outil aigu dont on reconnaissait les traces sur les parois. La pierre était de nature cornéenne, elle était désagrégée en fragments de diverses grosseurs. Le sol était recouvert de 9 pouces (250 mm) de terre végétale et planté de vignes. L'endroit où furent trouvées les armes dans le clos précité est appelé « le Fort Giron ». Cette parcelle se trouve en bordure de la route du bourg au Landas, (actuellement à partir de l'école privée des filles sur 75 m

Bénédiction des trois cloches

  Le clocher de l’église de Saint-Jean-de Boiseau retrouve son éclat, après une importante restauration. L’étage qui manque depuis la fin du XVII ème n’enlève rien à son intérêt. Sous l’habillage d’ardoises, une très belle charpente, a été visible quelques semaines par les habitants de la commune. Cette tour de bois massif, appelée beffroi sert à porter les trois cloches et limiter les efforts, qu’elles engendrent lors de leur fonctionnement, sur la maçonnerie. On ne les entend plus émettre les sons qui résonnaient autrefois pour annoncer les évènements, bons ou mauvais, qui marquaient la vie dans la cité. Pourtant elles sont toujours en état de fonctionner à l’aide d’un équipement électrique, mais aussi manuellement à l’aide d’une corde située dans la chapelle Sainte-Anne. Ces cloches ne sont pas les premières que le fier clocher abrite. En effet, avant la révolution il y en avait également trois dont nous avons connaissance grâce aux rapports des cérémonies de leur baptême.