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Le bureau de poste

Après 97 ans d’existence, 1924-2021, Saint-Jean-de-Boiseau n’a plus de bureau
le facteur dans les années 1950

postal. Voici l’historique d’un service pourtant si important pour les Boiséens.
Le télégraphe et le téléphone :
Le décollage économique de cette fin du XIXe siècle favorise la mise en application de nouvelles technologies et de nouveaux moyens comme le télégraphe, le téléphone et la poste. "Le Phare de la Loire" du 11 juillet 1899 relate l'invention du téléphone sans fil : un miroir réfléchit un rayon de lumière sur un récepteur de sélénium, et à l'autre bout un grand réflecteur parabolique argenté...
Le préfet de Loire Inférieure propose, le 22 mai 1885, de créer un bureau télégra-phique sur la commune de Saint-Jean-de-Boiseau. Après délibération, le conseil municipal, rejette cette suggestion pour des raisons budgétaires. Il argumente sa décision en indiquant :
- que la commune est composée de villages très éloignés du bourg qui seul en aurait le bénéfice alors qu'il ne compte que 266 habitants et n'est qu'à 2 km 400 du Pellerin.
- que la Télindière et ses 500 habitants n'est qu'à 1 km du bureau du Pellerin et 1 km 400 du bourg de Saint-Jean-de-Boiseau,
- que Boiseau, le plus fort village de la commune avec ses 621 habitants, n'est qu'à 1 km 500 du bureau d'Indret et que bientôt cette distance sera réduite par la création d'une nouvelle route projetée entre les deux localités.
- enfin, pour peu d'utilisateurs, il en coûterait à la commune le salaire d'un employé plus la somme annuelle de 100 F.
Pendant plusieurs années, de 1900 à 1905, le préfet relancera la commune pour l'installation du téléphone, mais la réponse sera toujours la même. C'est trop cher et on n'en a pas besoin… une cabine téléphonique publique se trouve à Indret et un bureau téléphonique au Pellerin… ça nous suffit1. Il faudra attendre 1945 pour que le téléphone soit installé à Saint-Jean-de-Boiseau.
La poste :
La fin du siècle voit le développement des échanges de correspondance dans les familles et cela prendra une grande ampleur pendant la guerre de 14/18. C'est aussi le début des premières cartes postales. Ces dernières vont connaître un énorme succès et nos ancêtres, fiers de savoir lire et écrire, vont noircir, au crayon de bois ou à la plume et encre violette, ces images que l'on collectionne précieusement aujourd'hui. Ceux dont les bases scolaires sont insuffisantes font appel à des écrivains publics chargés de rédiger les lettres de leurs concitoyens. Notre commune comptait deux écrivains pour cette fonction.
Saint-Jean-de-Boiseau cependant ne possède pas de bureau de poste. Le courrier doit être déposé au bourg dans une boîte à lettres située sur le mur de la mairie, puis il est dirigé vers le Pellerin lors du ramassage par le facteur. Au Pellerin, les lettres sont regroupées dans des sacs fermés avec un brin de ficelle nouée appelé cheveu en jargon de métier. Les extrémités de cette ficelle sont fixées par un cachet en cire sur l'étiquette ou collier donnant la destination du sac. Le transport des sacs postaux se fait par le train à la gare de Couëron.
La distribution du courrier est faite à pied par un facteur qui parcourt chaque jour et par tous les temps, près de 30 km. Le recrutement de cet employé est de la responsabilité du préfet qui engage obligatoirement d’anciens militaires. Le facteur rural est généralement un personnage pittoresque. Il est vêtu de sa blouse bleue et coiffé d’un képi noir à galon rouge. Il participe à la vie de la campagne, se charge des courses pour les fermiers isolés et propage les nouvelles. En échange de ses services, il reçoit quelques œufs et se désaltère gracieusement dans les caves : il entrait dans les fermes par la barrière de bois, plantée dans les talus qu'ombrageaient deux rangées de hêtres. Le chien logé dans un baril jappait avec fureur en tirant sur sa chaîne et le piéton, sans se retourner, repartait de son allure militaire, en allongeant ses grandes jambes, le bras gauche sur sa sacoche et le droit manœuvrant sa canne qui marchait comme lui, d'une façon continue et pressée. G. Maupassant : le crime du père Boniface.
Cependant sa vie est rude. Il part du bureau du Pellerin à 6 h du matin en été et 7 h en hiver. Ces longues journées se terminent souvent vers 18 h. Le règlement prévoit qu’il doit effectuer son parcours à 4 km/h, arrêt compris, mais cette clause n’est jamais respectée car impossible.
Le 9 septembre 1877, le conseil municipal de Saint-Jean-de-Boiseau considère que le facteur est incapable de satisfaire son service : considérant que le facteur rural partant du Pellerin, a maintenant trois communes à desservir : Saint-Jean-de-Boiseau, La Montagne et Brains. Que la distance qu'il a à parcourir et le nombre considérable des correspondances qu'il délivre sont trop importants pour les forces d'un seul homme. Qu'il ne peut en résulter de l'état de choses actuel, qu'un retard dans la délivrance des lettres, que ce n'est que fort tard dans la soirée qu'elles peuvent être remises dans la commune de Brains, ce qui force le facteur à ne rentrer au bureau (du Pellerin) qu'à 6 h du soir... Il arrive donc trop tard pour la fermeture des sacs du courrier qui s'effectue à 15 h.
Cela cause un préjudice certain pour les affaires. Le conseil municipal suggère que : on pourrait améliorer le service en ne fermant le paquet avec un départ du bureau qu'à 4 h du soir : ceci donnerait une heure de plus pour les correspondances qui pourraient toujours avec cette modification être revenues à temps pour le départ du train à Couëron.
A partir de 1902 le facteur sera doté d’un vélo. Il percevra une indemnité de 10 F pour l’achat et l’entretien de sa machine, plus 5 F de rémunération spéciale. Soit 15 F par mois. Le dimanche, cependant, il se postait à la sortie de la messe sur la place de l’église (cela dura jusque vers 1942) et là, les gens du village venaient retirer les correspondances adressées aux voisins. Rares étaient les erreurs et les réclamations.
Le 22 avril 1882, par décision du sous-secrétaire d'Etat des Postes et Télégraphes, une boîte aux lettres sera posée au village de Boiseau à condition que la commune prenne à sa charge les frais d'installation qui s'élèvent à 22 F et 50 centimes.
Le 7 avril 1892, M le Directeur des Postes et Télégraphes de la Loire Inférieure, demande le rattachement de la commune de Saint-Jean-de-Boiseau au bureau de poste de La Montagne. Le conseil refuse à l'unanimité cette proposition et souhaite que notre commune continue à être desservie par le bureau du Pellerin.
La fermeture des bureaux les dimanches et jours de fête est réglementée par la circulaire du 14 mai 1902 dans l'objectif d'accorder aux agents concernés le repos qui leur est dû. En 1890, elle a été prescrite à 18 h, puis 16 h en 1894 et midi les dimanches et fêtes en 1900 pour les bureaux des grandes villes. Or, aucune mesure analogue n'a pu être prise en faveur des petits bureaux de poste et de télégraphe établis dans les communes rurales dont le service effectué n'est pas inférieur à une durée moyenne de 10 à 12 h par jour. Beaucoup même ont un service de nuit à assurer par suite du passage tardif ou matinal d'un courrier.
Après enquête, il est donc décidé qu'à partir du 1er juin 1902, les guichets de tous les établissements de poste, de télégraphe et de téléphone, à l'exception des guichets télégraphiques et téléphoniques des bureaux de l'Etat à service complet, seront définitivement fermés à midi les dimanches et jours fériés.
La livraison des dépêches s'effectuait par les vapeurs "l'Abeille ".
A partir de janvier 1905 l'adjudication d'un service de poste pour le transport des dépêches de Nantes à Paimboeuf, par des omnibus automobiles de Dion-Bouton, est attribuée pour six ans à une société nantaise. Les arrêts prévus sont à Pont-Rousseau, Bouguenais, La Montagne, Le Pellerin, Vue, Frossay et Paimboeuf.
Le matin, départ de Nantes à 5 h et 6 h, arrivée à Paimboeuf à 8 h 40 et 9 h 40 et dans le sens inverse départ à 4 h 30 et 5 h.
Pour éviter toute critique par la création de ce service. Il est précisé que l'automobile qui fera le trajet Nantes-Paimboeuf ne roulera qu'à 17,5 km/h. On pense ainsi, par la création de ce service, que les lettres mettront moins de 12 h pour aller de Paimboeuf à la Montagne. Il y aura malgré tout un problème de distribution de courrier, car les voitures arriveront, matin et soir, une heure après le courrier de Nantes et Paris. Il faudra donc augmenter le nombre des facteurs. (Echo de Paimboeuf du 29/01/1905) (Echo de Paimboeuf du 6 juin 1924)
Il faudra attendre le 15 juin 1924 pour qu'enfin un bureau de poste soit installé à Saint-Jean-de-Boiseau. Le maire de la commune, Elie Hervé, se plaignait régulièrement auprès de son député des difficultés éprouvées par ses concitoyens pour envoyer leur courrier. C’est donc, à la suite de l’intervention du Marquis de Juigné, qui vient de recevoir du Sous-Secrétaire d’Etat aux P.T.T la lettre suivante, que le problème sera solutionné : Monsieur le Député et cher Collègue, vous avez bien voulu appeler mon attention sur l’intérêt que présenterait la création d’une agence postale à Saint-Jean-de-Boiseau. J’ai l’honneur de vous faire connaître qu’après examen de la situation, il a été possible de réserver une suite favorable à la demande dont vous vous êtes fait le bienveillant interprète. En conséquence, une agence postale est mise à la disposition du Directeur des Postes et Télégraphes de la Loire Inférieure pour être concédée à la commune de Saint-Jean-de-Boiseau… L’Agence Postale se trouvait dans la petite épicerie de M Saillant, rue Charles de Gaulle, à l’emplacement de la boulangerie actuelle.
A la suite du décès du commerçant, victime d’un accident, elle fermera un peu avant la seconde guerre mondiale. Il faudra l’insistance du maire, Hypolithe Gauthier, pour qu’en 1957 une agence postale revienne dans la commune. Elle se trouvait dans une maison, au Laka, à la sortie du bourg en direction de La Montagne. Une pharmacie viendra s’installer juste à côté dans les années 1980.
Thérèse Herfray :
La première postière en ces lieux était Thérèse Herfray notre ancienne secrétaire qui faisait aussi le service pour la sécurité sociale. A l’étage, se trouvait le logement de la secrétaire de mairie Mlle Rolet, et au rez-de-chaussée, derrière le bureau postal, celui du postier. Il n’y avait pas de cadeau, nous dit Jojo Herfray, il fallait payer l’eau et l’électricité et on a quitté cette maison pour construire rue des Charreaux.
Pour la majorité des habitants de la commune, ce fut longtemps le seul endroit d’où l’on pouvait téléphoner, moyennant paiement.
Lors de la création du centre commercial, inauguré en fin d’année 1998, rue du 11 novembre, un local est affecté pour le bureau postal et permet aux habitants d’avoir un service très utile pour l’envoi de colis, recommandés, livret et compte épargne etc...
Hélas, depuis février 2021, Saint-Jean-de-Boiseau n’a plus de poste sur son territoire et il faut aller au Pellerin ou à La Montagne : rentabilité oblige… Comme en 1924, c’est un commerce, le magasin Carrefour qui va servir de dépôt pour les colis, mais il manque les services de la banque postale pour les placements ou retraits d’argent liquide.
Le local de l’ancienne poste servira quelques années à héberger des artistes comme " La famille Debleu ".
Puis en 2016, il sera, comme l’ancienne pharmacie, démoli pour faire place à un immeuble. La population de Saint-Jean-de-Boiseau augmente chaque année, mais les services disparaissent.
Tout le monde n’a pas internet…

Jean-Luc Ricordeau

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